L'IMPORTANT EST... NOTRE RÊVE
L’IMPORTANT EST… NOTRE RÊVE
Il est cet écuyer de l’insouciance, ce chevalier de la fantaisie, ce noble et simple esprit se nourrissant de poésies qui savent apprêter ses belles armoiries ennemies des livrées d'un monde tant blasé qu'il est désabusé. Ainsi, et sans les vénérer toutes deux sottement, en cultiver et pour chacune quelques parcelles enchantées, disséminées mais essentielles en ce jardin de l’âme qu'est notre ciel d'envies et de désirs refusant de nous endormir, où mille projets à accomplir nous poussent à toujours et encore devenir. À trop être sérieux s’étiole notre rêve et se bouche nos cieux. Or, notre rêve, c’est nous, à nul autre pareil, et s'il demeure en veille car n'osant s'affirmer, c'est en celui des autres modelant notre temps que nous vivons errant, parfois amèrement, notre présent pétri de nos renoncements.
Comme une toile immense, une ancienne bâtisse d’Allevard, humble station thermale Iséroise, offre en un décor naïf brossé par l’innocence du cœur, un magistral tableau où deux enfants artistes aux sourires délurés, l'un juché, à mi-hauteur de l’édifice, sur un échafaudage amplement aérien, bellement incliné, l’autre debout sur une échelle à l’équilibre aléatoire, un pied sur un barreau, l'autre qui danse ailleurs et sans peur dans l'éther ; fille et garçon à l'unisson, leur pinceau à la main bravent le vide souverain et barbouillent leurs coins, inconscients du danger d'ainsi tant s'exposer en leurs plaisirs de peindre ce qu'ils savent oser, qu'ils ne peuvent brimer.
Ainsi leurs insouciances joyeuses aux fantaisies heureuses colorent différemment, chacune sur leur pan de chaux respectif, en leurs bourgeons naissants leurs rêves éblouissants de malices bambines. Ils ont inscrit, plus haut, caricaturant de leurs irrévérences ces frontons de morale sociale, se voulant nos censeurs, ainsi les claironnant en lettres inégales aux couleurs de la vie, de l’envie, du plaisir, leurs désirs d’être, celui d'agir et de jouir en belles fêtes, des libertés de leurs décors aux lettres d'or.
Sur l’une des façades on peut lire ceci : « L’important, c’est le rêve », sur l’autre, formant angle : « la réalité, c’est le rêve des autres ». Ainsi tout regard cheminant, en un premier temps amusé, se promène de gauche à droite selon les conventions de l’écriture occidentale ; Puis il reprend la lecture de cette rhétorique architecturale avec plus de profondeur, presque avec gravité, s’imprégnant alors des symboles hermétiques que ces mots déployés, si humbles écuyers d'un bonheur rayonnant fort simplement tracé par d'innocentes mains, délivrent à dessein en souverain message aux profondeurs oubliées d'une évidence qui frise le sacré, tant éclatante de vérités premières pour tout être de sang irradié de lumière.
Sise entre ciel et terre, si vive fresque d'espiègles flammes, bien ancrée en ses murs, demeure-t-elle suspendue. Ainsi elle illumine la placette et ses ruelles alentour de sa fraîcheur aède qui nourrit les chalands en quête de bonheur. D’autres, esprits étriqués soupirent leur mépris devant cette inconvenance philosophico-décorative, artistico-émotionnelle, cette transgression d’un conventionnel équilibre « façadier » rompu, comme ils pleurent leurs jours, et leurs renoncements. D’autres encore ne savent plus lever les yeux de peur de soutenir un regard étranger furtivement croisé pouvant les agresser, et passent indifférents à la beauté du lieu, comme ils le sont à celles du monde, qui pourtant si fécondes sauraient réenchanter leurs fenêtres fermées, leurs espoirs en jachère.
Cette fresque là-bas se révéla à moi en un beau soir d'été, je n'ai su l'oubliée, elle est mon bouclier ; je sais la courtiser de mes mille et un rêves dont certains ont germé quand d'autres attendent l'heure de leurs prochains bonheurs en espérance folle, qui pour eux farandole.
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