LAME DE FOND... TON ÎLE
LAME DE FOND… TON ÎLE
J’émergeais d’un amour destructeur, d’un tunnel noir. Je retrouvais le jour en lumière du soir, endolori encore, aveuglé par ma peine, cœur meurtri. Dérisoire sentiment d’une intense détresse je sombrais dans l’abîme d’un profond désespoir, m’y installais vaincu, puis m’enfonçais en son épais brouillard. Sans goût et sans ivresse je voguais sur ma vie ne prenant d’un bateau que le sillage gris qui m’éloignait d’un port où je n’étais plus rien. Pourtant, l’aventure m’attendait quelque part aux détours d’un chemin, puisque je la hélais, sans trop y croire, rêve illusoire de vaincre ainsi ma mort au détour d’un hasard, d’un message envoyé sur un site « racoleur », bouteille d’un au secours en cette mer d’ailleurs où tant de cœurs en pleurs et d’âmes solitaires espèrent leur bonheur.
Puis, comme c’est étrange, cette lame de fond, soudaine, de ce passé agonisant surgit des abysses de mon âme alors bien endurcie et tant endolorie avachie dans le lit de mon indifférence suicidaire, éruption salutaire fissurant son intime refuge en spontanéités de laves incendiaires. Langues de feu lascives, elles épousaient l’eau d’une secrète contrée de mon être emmuré renonçant à sa vie, privé de ce souffle fervent transcendant sa prison sans échos, froide comme la mort. Et, de ces noces sulfureuses en mes profondeurs de mystère fusait en une ébullition fantasmatique un magma de Tendresse, d’amour et de désir lubrique et frémissant auquel je ne prenais pas garde en ces premières heures, car n’en saisissant pas l’immédiate portée en ma superficie d’artificiels éclats. Cette chaleur grondait pourtant, lointaine, mais ses vapeurs bouillonnantes et parturientes annonciatrices d’un abyssal chambardement éthique ne troublaient pas encore la quiétude triste des vagues métronomes de mon cœur nonchalant qui s’étiolait encore en ennui récurent. Pourtant, là, ici et maintenant, comme un frémissement d’une étrange langueur, sensation de chaleur, cette impression exquise d’exister autrement, de respirer si pleinement un air nouveau, réconfortant. Or, de ces prémices précurseurs j’oubliais l’attention, encore pelotonné en mon sommeil autiste. Puis surgirent les premières bulles enfiévrées de cet exponentiel magma sur l’océan de ma raison craintive, toute puissante encore. Oh ! Elles demeuraient loin cependant de mes vieux littoraux aux habitudes fades sans grâces majuscules ; et seul ce mirage à l’horizon de mon regard, cette vapeur diffuse prenaient lentement corps en ces brumeux nuages de haute mer sans âge, alors que mes marées enflaient, hors équinoxe, en lentes amplitudes, douces, à peine perceptibles mais puissantes pourtant. Puis, violente et soudaine, l’une d’elle me surprit, démesurée, en vagues déchaînées qui balayaient ma terre en leur impétueuse tempête qui nivelait mes plages desséchées aux reliefs anciens de son intempestive et explosive violence. Raz démentiel, ondes aux souffles profonds, dévastateurs comme libérateurs, fièvre écumante, incandescente fusion d’éléments tourmentés en passion dévorante, affamée. Et, mon ancienne mer, sous ses vents, sous sa lave brûlante qui n’en finissait plus de jaillir du ventre débordant de ma terre parturiente, naissait une île merveilleuse, Ton île.
Quelques jours encore, à l’échelle du temps qui rythmait nos partages, puis Te voici, luxurieuse vénus parée de voiles charmeurs, de tes contrastes lumineux, saisissants, de tes criques sauvages et de tes baies ensorceleuses, de tes sommets neigeux scintillants au soleil de mon cœur en leurs talwegs nus aux adrets surchauffés par tes souffles embrasés, en leurs ubacs froids aux cruelles gelures ; en ces ombres douillettes comme cruelles aussi de tes secrets vallons qui épousent tes plaines, en tes vallées gourmandes, voluptueuses sous l’allant sibyllin de tes poses alanguies, amantes des lits féconds de leurs fleuves nuptiaux. Ainsi, mon horizon, hier cet infini de solitude grise, découvrait sous mes yeux, un nouvel univers où grouillait et la vie et l’amour, et l’envie pour tes jours. Il vibrait de mon désir ardent attisé par tant de tes effleurements, si capiteux, bercé par tes brises femelles, parcourait du regard ces magiques apparats de ta terre enflammée en ma terre enfantée. Toi, île de délices en mon âme tourments, tu étais ce diamant qui au loin scintillait, pour mes mille supplices, d’un autre sentiment.
Et Ton île en mon être avait gravé, et mon cœur et mon corps ; je respirais ainsi de l’air de tes décors, de tes trésors, je le respire encore. Telle elle m’est apparue une première fois, telle elle est, toujours là souveraine en mes nues, et m’offre tes éclats, en l’écho de Ta voix, sensuelle, ineffable compagne, de tes mots qui là-bas ne coulent plus de tes montagnes en glissant sur mes vents quand mes pas n’abordent plus ses rives. Un bras de mer austère, nous sépare, il me prive… De Toi ! Je ne sais y voguer avec assez d’aisance pour accoster enfin en l’une de tes anses au sable surchauffé de l’envie de tes sens, pour y être appelé, accueilli avec effervescence.
Alors, je croise au large de tes eaux de sirène, perdu sur mon radeau et si loin de tes plages. Frêle esquif de mots que tu ne reçois plus, je me nourris de Ton aura, de ta beauté, de son halo.
Et Ton île, joyau sacré de mon ego est ancrée en mon Être, accompagnant mes pas pour mon éternité.
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